Au cœur du mal, un Dieu présent qui responsabilise

La puissance de Dieu s’exprime à travers l’action de son Esprit dans les cœurs et les consciences. C’est là que se joue la puissance de l’amour. Un amour qui s’offre et ne s’impose jamais.

Au cœur du mal, un Dieu présent qui responsabilise

En effet, la puissance de Dieu s’exprime à travers l’action de son Esprit dans les cœurs et les consciences. C’est là que se joue la puissance de l’amour. Un amour qui s’offre et ne s’impose jamais : « Si tu veux me suivre... », « Choisis la vie ». Ce n’est pas, comme le pensaient les Anciens, à travers des phénomènes cosmiques comme le soleil, la foudre, ou les orages, que Dieu déploie sa puissance. Nous le voyons lorsque Élie demande à le voir. Il n’est pas dans le bruit, il n’est pas dans les grandes manifestations cosmiques, il est dans la brise légère (1 Rois 19, 12).

François Varillon écrit : « Dieu n’est qu’amour, je ne dois pas dire que Dieu est tout-puissant, puisqu’Il n’est qu’amour, Il n’est pas autre chose. S’il n’en va pas ainsi, ne disons pas que Dieu n’est qu’amour, disons qu’Il est tout-puissant, qu’Il est aussi amour et qu’Il nous aime aussi 7. » L’amour n’est pas un attribut de Dieu. Dieu n’est qu’amour, et tout le reste, ce sont des attributs de l’amour. La puissance est un attribut de l’amour, la vulnérabilité est un attribut de l’amour. Et s’il faut parler de toute-puissance, la grandeur de Dieu est d’avoir créé des libertés. Nous ayant créés à son image et à sa ressemblance, il nous a créés libres. Dieu a pris un risque immense dans sa création, risque dont on voit les conséquences dès la Genèse, lorsqu’il parcourt le jardin, en cherchant Adam qui s’est caché.

Voilà le risque que Dieu a pris : qu’un jour Adam veuille prendre sa place. Cette tentation de toute-puissance, nous l’avons tous rencontrée dans notre propre vie à un moment ou à un autre. Par exemple quand nous voulons tout décider par et pour nous-même, mais aussi dans notre façon de gérer ou de régir la vie des autres, parfois de vouloir les « sauver », ou de vouloir tout connaître, tout expérimenter, tout contrôler.

Xavier Thévenot a enseigné que la vie spirituelle est un chemin de démaîtrise, alors que notre tentation contemporaine, c’est de tout gérer. Aujourd’hui, dans les sociétés occidentales, nous ne supportons pas de ne pas pouvoir « maîtriser ». Même quand il y a une tempête, il faut trouver un coupable. On veut à tout prix assurer la traçabilité d’un aliment, parce qu’en cas de problème, on veut pouvoir punir quelqu’un. Certes, il faut promouvoir la responsabilité. Mais nous sommes dans une société extraordinairement narcissique où le risque et l’accident n’ont plus de place, une société qui est donc tentée par la toute-puissance.

Comment parler cependant d’une toute-puissance en Dieu ? Une autre façon de se" représenter la toute-puissance de Dieu est de la comprendre dans le sens d’une puissance créatrice de vie et d’être. Dieu est celui qui maintient toute créature dans son être, car la création est permanente. Dieu est puissance de vie et d’amour, et il donne sans cesse la vie. Quels que soient les échecs, les refus, les exterminations, Dieu continue à donner la vie en surabondance. Mais, encore une fois, cette toute-puissance de fécondité et de vie s’incline devant notre liberté et s’inscrit dans les lois de la création. Peut-être est-ce cette conception de la toute-puissance comme plénitude de vie qui rejoint le mieux la sensibilité de nos contemporains... et qui est le plus conforme à la révélation biblique.

Un Dieu qui responsabilise

L’expression « toute-puissance » peut aussi être comprise dans un autre sens. La création du monde a été un acte de toute-puissance, de même qu’à la fin des temps, Dieu récapitulera tout en Christ. Entre ces deux moments, création et eschatologie (fin des temps), se situe l’espace de notre liberté et des lois du monde, celui où nous avons à prendre notre responsabilité.

Le mot « responsable » signifie « capable de répondre de ». Donc, si Dieu me responsabilise, cela signifie que je dois être capable de répondre de mes actes, de mes paroles, de ce que je vis. Je suis donc renvoyé à ma liberté, à ma conscience. Dans cette responsabilité, j’ai la tâche de former ma conscience. Car c’est elle qui tranche en dernier recours, une conscience informée et formée, qui s’accompagne d’intelligence.

Si nos soucis et nos souffrances nous poussent parfois à chercher un Dieu qui serait tout-puissant, cela ne nous dispense cependant jamais de notre responsabilité. Dieu vient au secours de notre liberté, de notre responsabilité vacillante par sa grâce et par l’aide des autres, mais il ne nous dispense jamais de choisir. La magie et la spiritualité sont différentes en ce que, dans la magie, quand la bonne personne dit les bonnes paroles au bon moment, le résultat est censé se produire automatiquement. On est alors dans une relation binaire : un homme agit sur la divinité ou le cosmos de façon automatique en vue d’un résultat visible et immédiat. En principe, il se produit, si ce n’est pas le cas, si la personne qui sert de médium n’est pas fautive, l’échec ne met jamais en question le pouvoir magique. Or, la pensée magique-revient en force aujourd’hui. De plus en plus de personnes attendent le bonheur ou la solution à leur problème d’un acte de magie : que ce soit en tirant un billet de loterie ou en consultant des voyants. La vie est alors considérée comme un champ de forces plus ou moins arbitraires où la liberté individuelle dépend de personnes qui s’octroient des pouvoirs de médium souvent invérifiables. On passe ainsi d’une conception païenne de la toute-puissance de Dieu à celle d’un être humain. Dans les deux cas, il n’existe plus ni conscience ni liberté personnelles face aux épreuves de la vie.

Dans une démarche spirituelle, on ne se situe plus dans un binôme fusionnel mais dans une relation à trois : l’intercesseur, l’homme ou la femme en difficulté (qui peut être soi-même) et Dieu. La personne adresse une demande à Dieu en lui laissant la liberté de répondre, en lui faisant totalement confiance, lui qui sait ce qui est bon pour ses enfants. Nous pouvons donc nous poser la question : « Quelle est ma manière de m’adresser à Dieu quand j’intercède pour quelqu’un ? » Car je peux être aussi dans la toute-puissance dans une demande. Les nombreux cierges allumés à Lourdes peuvent être une expression de la foi. Sans doute en avons-nous besoin pour exprimer notre demande, mais le temps de Dieu n’est pas celui de l’homme, sa réponse n’est pas celle de l’homme. Nous n’avons pas à faire pression sur lui. Il peut y avoir une tentation de manipuler Dieu. De même, dans certains groupes de prière, on peut en arriver à le mettre en demeure de répondre dans le sens demandé... Il est vrai que, certains jours, nous sommes terriblement déconcertés par son silence, mais laissons Dieu être Dieu.

Notre Dieu n’est donc pas tout-puissant dans le sens le plus spontané du terme, mais il n’est pas impuissant, car il est toujours à l’œuvre, nous dit Jésus (Jean 5, 17). Dieu est vulnérable comme le chante le psalmiste qui nous rappelle que quand un pauvre crie, Dieu écoute 8. C’est un Dieu qui n’est pas indifférent. Pour le pasteur Daniel Bourguet, Dieu n’est pas absent, il est pudique 9. Dieu ne s’impose jamais (comme avec le jeune homme riche, ou quand Jésus pleure sur Jérusalem...).

Comment pouvons-nous alors parler d’un Dieu vulnérable sans porter atteinte à sa transcendance, au fait qu’il est plus grand que tout ce que nous pouvons imaginer de lui et qu’il ne change pas au gré de l’histoire ou de nos caprices ? Que peut signifier un Dieu à la fois puissant et vulnérable ?

De Bernard Ugeux, Extrait de "traverser nos fragilités"

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